04 mars 2008

Faisons un Rêve

Le gouvernement a construit un système où le parti dominant génère son opposition en son propre sein, leucocytes factices, contestataires de pacotille, l’agitant un peu pour faire comme si au 20h, et la digérant instantanément... A l’heure du Tout Communicant, on se retrouve souvent en pleine cacophonie formatée, et surtout, paradoxalement, orchestrée.

Le renforcement du pouvoir (économique, médiatique, politique) rendu possible par l'élection de Sarközy de Nagy-Bocsa n'est que la conclusion logique de la déconfiture du paysage politique depuis 25 ans et notamment de la fin de l'illusion mitterrandiste : Marie-Ségolène Royal et le PS incarnerait une vraie alternative dans ce pays ? Cette gauche ne s'offusque pratiquement sur rien de ce que fait le gouvernement parce que ce qu'elle n'approuve pas, ce ne sont pas les réformes mises en oeuvre mais la méthode. C'est la seule chose qu'elle désapprouve mollement de ce gouvernement. Impressionnant. Avec le débauchage de toute cette gauche cynico-caviar qui nous gonfle depuis tant d’années, celle-ci n'a même plus honte maintenant d'avouer franchement, en répondant au geste tendu de Sarkozy, qu'elle n'a plus de conviction profonde que la poursuite de sa propre carrière dans les hautes sphères du pouvoir. Quelle fine invention que cette notion de gouvernement d’ouverture ! On se demande bien qui se fait élargir, au final. Vous avez trouvé ? Bravo. Pas trop douloureux ?
Conscience de la finance comme ultime gouvernance subliminale. Arme de paupérisation massive. Fléau mondial. Il semble clair que la machine s'emballe. Au macroscope: l'envol de l'Euro (ou les Etats-Unis qui pètent les plombs, ou encore le grand méchant marché asiatique), les charges des ménages (aussi plombées que l’eau du robinet), la valeur travail qui se peau-de-chagrinise, l'endettement (vie et mort à crédit) bien étalé dans le canal lombaire, les corollaires du découragement prennent le périph’ du facile, du people, du tout se vaut, du tout se monnaye. Ce n'est pas la Boîte de Pandore c'est déjà du décor, de la parade, du spectacle de volonté mais surtout du Spectacle. On commence par la pensée, puis les acquis sociaux, par démonter ce qui peut éventuellement en rester (basta 68, au pilon les 35 heures, enregistrez vos rêves puis détruisez leurs séquelles, travaillez plus pour dépenser plus en achetant de la merde, mettez des podiums et des spots ça rappellera le grand soir) ; le sens expire, l’expression prime, comme le chantait Marquis de Sade. Et vivement le prochain Doc Gynéco avec Mosey à la
prod’, qu’on s’éclate sur du putain de bon son...
Alors quand on nous dit que la politique est un métier et que dans le même temps, on s'époumone contre les cheminots, les fonctionnaires (ou encore vous et moi ?) parce qu'ils ne défendraient que leurs intérêts particuliers, je me gausse : il y a maintenant bien longtemps que les politiques dans leur ensemble ne suivent que la courbe de leurs intérêts particuliers, à savoir leur foutue carrière, au détriment du plus grand nombre tout en feignant d'agir pour le bien commun. Prenons un exemple au hasard : Montebourg. Est-il crédible plus de deux secondes ? Et l'immonde de Panafieu, qui croit-elle tromper ? Simplement avec Sarkozy, ça devient de plus en plus clair même pour le péquin moyen. Mais tant qu’il lui reste les slogans, les refrains,
Zebda et les merguez, il est content le quidam qui manifeste, non ?
Et que dire d'étudiants en grève ou d’associations veules chez qui l'ânonnement pavlovien de vieux slogans semble tenir lieu de réflexion ? De la rouille crasse enrayant leurs cerveaux ? Leurs poses de rebelles masquent mal un conformisme béat lorsqu'ils récitent un catéchisme (cathétérisme ?) gauchiste et désuet leur ôtant le fardeau d’avoir à penser, voire réfléchir, par eux-mêmes. La bêtise intrinsèque de leurs exposés fait surtout frémir quand on pense qu'un ou deux parmi eux finira bien sénateur PS ; et c’est bien là l’essentiel, à priori. Ouf, nous voilà rassurés pour eux. Un bien triste renoncement aux idéaux de la jeunesse et à son essence imprévisible et révolutionnaire.
Alors arrêter les cycles infernaux, servilement, stérilement électoraux. Se peut-il qu'une société soit réellement humaine et collective (des gens qui crèvent en bas de chez moi, des bébés en rétention administrative !), des idées plus grandes peuvent-elle encore contenir l'irréel puis le réel, peut être faut-il sauver l'individu (seul devant l'univers, universel, irrépressible, inaliénable) sauver la conscience de l'individu, sauver l'intelligence pour bâtir une société, puis du
social, et des paroles en circulation qui (re)deviendraient politiques du coup.

Sauver l'utopie, sauver le simplisme complexe, lire et relire Bourdieu et Deleuze, dépoussiérer Artaud, Debord et Dada (et peut-être même Breton). La révolution ne peut plus être que surréaliste, elle ne peut que grimper sur la réalité, s’en extirper pour la surplomber, la toiser et la tirer enfin – qui sait ? – vers le haut...
Rêvons.